Votre arrivée

Vous vous réveillez, allongé sur un lit de feuilles, fixant un ciel très clair. La première chose que vous remarquez en vous relevant, c'est que tout ce qui vous entoure est d'un blanc immaculé, à commencer par les feuilles sur lesquelles vous reposez.
Curieusement elles n'ont rien de différent, hormis leur couleur blanche qui n'a rien de naturelle, mais elles n'ont pas d'odeur, et entre vos doigts elles ne bougent pas...
Le vent est absent en ces lieux, rien ne bouge si ce n'est ce ciel, qui défile trop vite, sans jamais dévoiler le soleil, et sans jamais nous montrer la lune.
Puis c'est alors que vous commencez à vous demander si vous êtes bien réveillés. Et si c'est bien le cas, quel est ce lieu et comment y êtes vous arrivé ?
La réponse à cette question ne vous vient pas en tête, vous n'avez plus vraiment de souvenirs, peut être votre nom vous échappe, même mais cela ne devrait plus tarder.
Vous vous levez, faites quelques pas dans cette herbe et c'est en la foulant que vous vous rendez compte que son contact, comme celui du sol contre vos pieds ne fait aucun bruit, et que vous semblez avoir perdu la notion de toucher.
Vous marchez sans sentir le sol, vous le devinez simplement.
Au loin apparaît un petit chemin de terre battue, cela vous attire, alors vous vous ruez vers ce dernier.
Il ne semble pas vraiment fréquenté, et vous vous baissez vers cette terre grisonnante qui ne vous dit rien de bon.
Vous marchez maintenant depuis un temps que vous avez cessé de compter, et aucun bruit, aucun chant, rien. C'est un paysage beau mais il n'y a rien de plus mort que ce lieu.

C'est à cette pensée que le vent se lève. Vous ne le sentez pas sur votre peau, mais vous voyez votre vêtement et votre environnement se plier sous son passage.
Il siffle légèrement à vos oreilles, à cela s'accompagne une douce mélodie.
Vous tournez sur vous même, essayant d'en trouver la source, jusqu'à en perde votre équilibre.
Sans vous en rendre compte, à tourner ainsi, vous êtes sortis du sentier et cela a facilité votre chute, qui a curieusement été indolore.
Vos yeux se posent alors sur une forme, bien que particulière, elle vous rappelle quelque chose.
Une paire d'ailes, des cheveux blonds, c'est un ange, qui tient près de ses lèvres une flûte.
Il vous regarde et vous faites de même, puis peu à peu tout devient clair dans votre tête.
À vrai dire, l'ange y est pour beaucoup, mais maintenant il n'a plus vraiment d'importance.

Vos yeux ébahis deviennent encore plus ronds et votre visage exprime la plus grande surprise que vous pouvez imaginer. vous êtes mort, et vous êtes ici dans ce que beaucoup ont appelé le passage.

L'ange se pose à vos côtés, gardant sa flute entre ses doigts, mais vous regardant avec un sourire des plus chaleureux.
"Bienvenue ! Vous n'êtes pas encore au Paradis, mais pour cela, il vous faut suivre ce chemin qui vous était invisible tout à l'heure, celui que vous arpentez ne mène nulle part. Je dois vous laisser, j'ai d'autres âmes à guider !"
Il s'éleve dans le ciel avant même que vos lèvres ne s'ouvrent pour lui poser les questions qui vous trottent en tête.
Vous le regardez disparaître, puis vous suivez alors son conseil et vous dirigez vers le chemin qu'il vous a indiqué.
Au loin vous voyez quelqu'un, alors vous accélérez le pas pour aller à sa rencontre. C'est un vieil homme tout droit sorti du début du siècle, c'est certain, son costume, sa façon de marcher, sa coiffure. Tous les détails que vous avez rapidement fait d'énumérer vous le prouvent, puis c'est ce qu'il vous confirmera en vous parlant.
Il vous dira que cela fera bientôt 100 ans qu'il marche le long de ce chemin, à la recherche de sa femme qui devait l'y attendre.
Puis il vous annonce le nouveau chemin à prendre pour vous rendre devant les portes du purgatoire, et c'est avec plaisir qu'il s'engage sur ce chemin avec vous.
Vous devez néanmoins vous séparer et vous passez la porte seul.
Ce que vous voyez derrière cette dernière n'est pas ce à quoi vous vous attendiez.
Une allée infinie avec au loin ce qui vous semble un escalier qui n'en finit plus...
De plus, de part et d'autre de cette allée se trouvent des nuages.
Mais cette allée grouille de monde, puis vous allez à la rencontre de la première personne que vous voyez, et cela vous fait découvrir que le purgatoire est plein, et que tous ces gens, des milliards et des milliards attendent pour y trouver leur place.
Puis, au hasard d'une rencontre, on vous fait part de l'existence d'un hôtel, pour ceux qui n'en peuvent plus d'attendre. Bien sûr, personne ne veut quitter sa place dans la file, de peur de la perdre. Mais vous qui semblez encore un peu raisonnable êtes partagé(e) entre deux choix possibles.
Viendrez-vous directement à l'hôtel ou bien préférez vous faire un long séjour dans l'interminable file ?
Alors vous suivez ce commercial qui vous remet la plaquette de l’établissement, parce que cela vous permettra sans doute de mieux comprendre et de mieux vous aider à passer directement dans l’autre monde quel qu’il soit.

Vous vous engagez alors, sur une fine allée bordée d'arbres au feuillage blanc, puis l'immense bâtisse apparaît sous vos yeux. Une architecture vieille de plusieurs siècles mais toujours aussi belle.
Les jardins qui l'entourent sont semblables à la végétation que vous avez connue en arrivant ici, des feuilles et fleurs blanches.
L'imposant porche est orné d'une multitude de sculptures, des visages d'hommes et de femmes, ils restent un mystère pour tous ceux qui ont passé les deux lourdes portes que ces têtes dominent...Sauf peut être quelques personnes.
Le hall qui suit est immense, carrelage blanc, quelques tentures blanches également, tout semble pourtant très gai et lumineux, et c'est sur quelques autres fresques sur les murs que les regards s'attardent le plus souvent.
Puis vous apercevez un guichet de l'autre côté de la salle. Il n'y a vraisemblablement personne, mais vous vous y aventurez quand même, puis vous devinez une petite sonnette posée sur l'une des extrémités du comptoir.
Vous regardez quelques instants le mobilier, puis vous vous rendez compte qu'il est loin d'être récent, mais toujours en bon état, même dans un état impeccable !
Vous restez quelques instants planté devant ce qui vous semble être une plume dans son encrier.
Votre main se tend vers la petite sonnette, que vous vous apprêtez à tirer, quand tout à coup une main se glisse entre la votre et son objectif.
Vous levez les yeux et devinez un homme, bel homme même, mais qui demeure hors du temps, sans âge.
Ses cheveux bien coiffés sont courts, son visage sans expression, il porte un costume trois pièces comportant un pantalon noir, une veste blanche et un gilet noir, plus un petit nœud papillon noir également.
Il vous fait comprendre que cela ne sert à rien d'appuyer maintenant sur la sonnette car il est là.

Il vous montre le règlement de l'établissement, puis vous parle de son aspect invisible de l'extérieur et votre main, sans s’en rendre compte, signe l'énorme registre.